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Observatoire Européen sur le respect des droits fondamentaux

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Jurisprudence 74420/01 (05/02/2008)

Type: Arrêt de Grance Chambre

Autorité: Autorités européennes: Cour européenne des droits de l'homme

Date: 05/02/2008

Objet: La Cour a conclu, à l’unanimité, à la violation de l’article 6 § 1 (droit à un procès équitable) de la Convention européenne des droits de l’homme. Invoquant l’article 6 (droit à un procès équitable), le requérant alléguait que les autorités de l’Etat l’avaient incité à commettre une infraction qui lui avait valu d’être injustement reconnu coupable de corruption. Il soutenait par ailleurs que, au cours du procès, ni les juges ni les parties n’avaient eu l’occasion d’interroger VS. Il y voyait une violation du principe de l’égalité des armes et des droits de la défense. Article 6 § 1 La Cour estime que les autorités nationales ne peuvent s’exonérer de leur responsabilité pour les agissements de policiers en se bornant à invoquer le fait que ceux-ci, bien qu’accomplissant des actes de nature policière, auraient agi « à titre privé ». La responsabilité des autorités s’impose d’autant plus que la phase initiale de l’opération a été menée en dehors de tout cadre légal, en l’absence de toute habilitation judiciaire. En outre, en autorisant VS et AZ à simuler l’accomplissement d’actes de corruption et en affranchissant ce dernier de toute responsabilité pénale, les autorités ont régularisé ex post facto la phase préliminaire et mis à profit ses résultats. Par ailleurs, aucune explication satisfaisante n’a été fournie quant aux raisons et aux motifs personnels qui auraient conduit AZ à approcher le requérant de son propre chef sans en informer ses supérieurs, et aucune justification suffisante n’a été donnée au fait qu’il n’a pas été poursuivi pour les actes qu’il a commis lors de cette phase préliminaire. Sur ce point, le Gouvernement s’est contenté de renvoyer au fait que tous les documents pertinents avaient été détruits. La Cour en conclut que les actes litigieux sont imputables aux autorités. Les actes accomplis par AZ et VS sont allés au-delà du simple examen passif d’une activité délictueuse existante puisque rien dans le dossier ne montre que le requérant avait commis des infractions auparavant, en particulier des infractions relevant du champ de la corruption, que toutes les rencontres entre l’intéressé et AZ ont eu lieu à l’initiative de ce dernier et que le requérant semble avoir eu à subir de la part de VS et de AZ une insistance caractérisée pour qu’il se livrât à une activité criminelle dont aucun élément objectif ne laissait supposer qu’il l’envisageait. La Cour relève que le requérant a fait valoir tout au long de la procédure qu’il avait été incité à commettre l’infraction. En conséquence, les autorités et les juridictions internes auraient dû, à tout le moins, examiner de manière approfondie la question de savoir si les autorités de poursuite avaient provoqué ou non la réalisation d’un acte criminel. A cet effet, elles auraient dû vérifier notamment les raisons pour lesquelles l’opération avait été montée, l’étendue de la participation de la police à l’infraction ainsi que la nature de la provocation ou des pressions exercées sur le requérant. Cela était particulièrement important compte tenu du fait que VS n’a jamais été appelé à témoigner en l’espèce puisqu’on n’avait pu retrouver sa trace. Sur chacun de ces points, le requérant aurait dû être entendu en sa défense. Or, les autorités internes ont nié toute provocation policière et n’ont pris aucune mesure, sur le plan judiciaire, pour examiner sérieusement les allégations du requérant à cet égard. Plus particulièrement, elles n’ont aucunement tenté d’éclaircir le rôle joué par les protagonistes, alors pourtant que la condamnation du requérant se fondait sur les éléments de preuve recueillis à la suite de la provocation policière dénoncée par l’intéressé. La Cour relève que la Cour suprême a conclu que, une fois la culpabilité du requérant établie, la question de savoir si des facteurs extérieurs avaient pu influer sur sa détermination à commettre l’infraction avait perdu toute pertinence. Or, l’aveu d’avoir commis une infraction à laquelle on a été provoqué ne saurait faire disparaître ni la provocation ni les effets de celle-ci. La Cour estime que les agissements de AZ et VS ont eu pour effet de provoquer le requérant à commettre l’infraction pour laquelle il a été condamné et que rien n’indique que, sans leur intervention, celle-ci aurait été commise. Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1. Article 6 § 3 d) La Cour n’estime pas nécessaire d’examiner séparément sous l’angle de l’article 6 § 3 d) le grief tiré du caractère inéquitable de la procédure.

Parties: Ramanauskas c/ Lituania

Classification: Justice - Art. 47 Jugement èquitable, public