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Observatoire Européen sur le respect des droits fondamentaux

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Jurisprudence 39051/2003 (13/12/2007)

Type: Arrêt

Autorité: Autorités européennes: Cour européenne des droits de l'homme

Date: 13/12/2007

Objet: La Cour conclut, à l’unanimité, à la violation de l’article 8 (droit au respect de la vie familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme, en raison de la perte de la filiation maternelle d’une des requérantes à la suite de son adoption par le compagnon de sa mère. Les requérants alléguaient que les effets de l’adoption d’Isabelle Emonet par Roland Emonet sont contraires au droit au respect de leur vie familiale, tel que garanti par l’article 8. Article 8 La Cour estime que la rupture du lien de filiation entre Isabelle Emonet et sa mère, conséquence de l’adoption, constitue une ingérence dans l’exercice du droit des requérants au respect de leur vie familiale, laquelle ingérence était prévue par le code civil suisse. La question qui se pose alors à la Cour est de déterminer si cette ingérence poursuivait un but légitime et était « nécessaire dans une société démocratique ». Quant à l’argument du gouvernement suisse selon lequel les requérants auraient pu éviter cette perte de filiation en se mariant, la Cour estime qu’il n’appartient pas aux autorités nationales de se substituer aux personnes intéressées dans leur prise de décision sur la forme de vie commune qu’elles souhaitent adopter. Elle rappelle que la notion de « famille » au sens de l’article 8 ne se borne pas aux seules relations fondées sur le mariage, mais peut englober d’autres liens « familiaux ». La Cour note que la Convention européenne en matière d’adoption des enfants de 1967 prévoit que les droits et obligations du père ou de la mère d’un enfant cessent d’exister dès l’adoption. Cependant, la Cour relève que seuls 18 Etats membres du Conseil de l’Europe ont ratifiée cette convention, et qu’il existe actuellement un projet de convention révisé qui prévoit qu’il peut n’y avoir pas de perte de la filiation d’origine en cas d’adoption par le conjoint ou le partenaire enregistré du parent de l’enfant. Selon la Cour, c’est le signe d’une reconnaissance grandissante, dans les Etats membres du Conseil de l’Europe, pour les adoptions comme celle à l’origine de la présente affaire. Par ailleurs, la Cour estime qu’on ne saurait reprocher aux requérants d’avoir méconnu l’ampleur des conséquences découlant de leur demande d’adoption, qui a entraîné la rupture du lien de filiation entre les deux requérantes. Dans ces conditions, la Cour estime que le « respect » de la vie familiale des requérants aurait exigé la prise en compte des réalités, tant biologiques que sociales, pour éviter une application des dispositions de la loi à cette situation très particulière, pour laquelle elles n’étaient manifestement pas prévues. L’absence de cette prise en compte a heurté la volonté des individus concernés, sans réellement profiter à personne. La Cour conclut donc à la violation de l’article 8 de la Convention.

Parties: Emonet et autres c/ Svizzera

Classification: Liberté - Art. 7 Vie privée